dimanche 31 mai 2009

LE LISEUR




Le livre admirable et passionnant de Schlink était destiné à être porté à l'écran de par sa charge émotionnelle, ses rebondissements et l'habilité avec laquelle il mêle dans sa trame le récit intime et la dimension historique. C'est le brillant Stephen Daldry qui s'y colle sous la production de Pollack et Minghella (hélas disparu), Daldry auquel on doit les magnifiques classiques que sont "Billy Elliot" et "The hours".
Le résultat est une réussite sous tous les aspects qu'on peut exiger d'un grand film populaire: acteurs bouleversants, réalisation fluide et minutieuse, direction artistique et photographie superbes, musique captivante... un vrai bonheur de film style "cinéma de qualité" qui illustre soigneusement le roman et réussit à en proposer une version digne.
Kate Winslet y est magnifique et d'une grande justesse d'interprétation, comme si elle concentrait en elle l'unique dose de talents que Hollywood semble réserver à une seule actrice par décade ( après Meryl Streep, ce sera Winslet qu'il faudra suivre pour signaler les block-busters qui pensent). Les autres acteurs sont tous par ailleurs impeccables.
Dans cette histoire sombre où la Shoa croise l'érotisme, où la grande et douloureuse histoire se mêle à l'initiation à l'amour et à la vie dans toute sa splendeur, ce qui est vraiment bouleversant c'est de voir comment la littérature assume cette synthèse entre les époques et les individus et permet de tisser des liens, d'humaniser, de sauver quelque chose de l'horreur globale.



La voix des livres, c'est celle de l'amant ébloui et tourmenté, celle de celui qui essaie de comprendre et d'aimer l'humanité d'une femme capable de servir des crimes immondes et d'initier à ce qu'il y a de plus beau, le don de soi et l'amour de l'autre.
La richesse de cette oeuvre en font certainement une des plus complexes sur le plan de la réfléxion morale à la fin du 20 ème siècle.
Un film à lire absolument.



BANDE-ANNONCE : http://www.youtube.com/watch?v=8tCqSm4Phug&feature=related

samedi 30 mai 2009

MUSIQUE CATHARTIQUE

En ces après-midi de pluie, "una tarde gris" comme chanterait le tango, quand le niveau de mélancolie monte dangereusement et que l'on charrie quelques sacs trop lourds et bien inutiles, une saignée s'impose. Musicalement, j'ai alors recours au CD "Symphonique Sanson" qui est un remède, une expiation mélomaniaque de premier ordre. Enregistré en 1989 avec l'orchestre Fisyo de Praga, cet album live est une collection des chansons les plus romantiquement insoutenables de Sanson : "Amoureuse", " Ma révérence", " Le temps est assassin", "Vancouver", "L'amour qui se bat", " M le maudit", "Mes démons" etc... Bref tout ce qu'un dépressif aigu peut espérer d'une chanteuse écorchée vive et lyrique à l'extrême.

Moi, le vibrato de Sanson agit comme un archer sur mon coeur, et ses graves me tordent les boyaux, ses aigus me laminent, tout me fait souffrir avec extase dans sa voix. Portée ici par l'orchestre au grand complet, dirigé par Jean-Claude Vannier, compositeur des meilleurs moments de Gainsbourg, le romantisme est fulgurant et imparable, à se rouler par terre, dans l'obscurité en chantant comme une casserole cabossée!On y trouve aussi une reprise d'un vieux thème de Bruant " A Saint -Lazarre" d'ailleurs repris par Barbara qui est une émouvante lettre d'amour en argot chantée par une détenue à son mac qui fait des siennes en ville.


Je trouve extraordinaire qu'une artiste comme Sanson ait su imposer dans l'univers édulcoré de la variété des années 70, ses chansons si pleinement douloureuses et émotionnelles, servies par des vers d'un lyrisme de poète maudit. C'est beau et revigorant cette impudeur dans le mélodrame, ces effusions sentimentales, cette rage, cette passion. Je n'admire rien de plus chez un artiste que cet art d'être excessif et d'avancer le coeur offert. Sanson est la dernière des chanteuses sombres et affectives de la chanson française. (Damia, Fréhel, Piaf, Barbara, Dufresne, Ringer) Après elle je crains qu'on ne chante plus que la mièvrerie des passions consuméristes et des chansonnettes spirituelles. Faut que ça saigne quand même un peu!




vendredi 29 mai 2009

UNE EDUCATION LIBERTINE, UN ROMAN FLEUVE


Le premier roman de Jean-Baptiste del Amo ( 26 ans) a été la sensation de la rentrée littéraire 2008. "L'éducation libertine" est un gros roman d'apprentissage à la Balzac ou Flaubert avec pour cadre historique le Paris nauséabond et poudré du 18ème siècle. Gaspard jeune provincial monté à Paris sans talents particuliers va en quelques saisons passer de la fange au boudoir via les servitudes imposées à son corps. Traînée, exploitée, avilie, adorée et martyrisée, sa jolie carcasse sera son sauf-conduit vers les cimes de la société.

Cet itinéraire façon Bel-Ami homosexuel donne à ce brillant auteur l'occasion de déployer une débauche d'effets de styles et de morceaux de bravoure descriptifs qui stupéfient puis fatiguent. L'excès de zèle et la surcharge sont souvent les défauts des premiers romans, certes, mais ici on sent une complaisance et une insistance un peu sadique ( le marquis n'est jamais très loin!) dans la surenchère de détails sordides, organiques, sensoriels et scatologiques... A la manière de Suskind et de son "Parfum" , del Amo prend plaisir à tout disséquer et à recomposer la moindre note olfactive d'un Paris empuanti par toutes sortes de remugles. Cette rage de nous innonder de sensations fortes et de saturer les pages d'odeurs pestilentielles et de contacts crus et brutaux, explose dans les descriptions-tunnels consacrées à la morgue où les cadavres pourrissent, aux abattoirs où la viande saigne, à la place de Grève où les éxécutions rassemblent des foules avides de violence, au lit de la Seine qui charrient des corps de suicidés... Ces passages semblent parfois relever de l'exercice pour virtuose littéraire qu'est incontestablement del Amo, mais ils lassent immanquablement. Il ya un plaisir sombre et régressif à écrire ces pages-là, mais pas à les subir. Je préfère quand l'auteur nous offre une scène sexuelle où son art devient plus impulsif, plus direct et il y en a quelques -unes, notamment avec ce double de Valmont et Vautrin qu'est le comte Etienne de V, ou avec le jeune palefrenier pris d'assaut, qui valent la relecture!


Gaspard Ulliel serait parfait dans le rôle du Gaspard del Amo


Par ailleurs la fulgurante évolution sociale du jeune apprenti ignare et lourdaud qui se métamorphose en bel esprit de salon est mal rendue et apparaît invraisemblable. Du lupanar au grand monde il n'y a qu'un pas ou qu'un saut, mais les ellipses de l'auteur sur cette mutation affaiblissent le récit.

L'intérêt du roman repose je crois dans la description "du vice français" qui s'il a été universellement pratiqué a rarement eu sa place en littérature avant le 20ème et Proust ( duquel del Amo se réclame). Traiter le thème de l'homosexuel dépravé prostitué façon Jean Genet (influence plus notable dans les raffinements de style baroque) mais le faire avec un style réaliste et naturaliste appliqué à un siècle des Lumières où soufflent les esprits de Diderot, Sade et Rousseau, voilà l'originale synthèse de cette oeuvre.

On se laisse embarquer, c'est vrai, car malgré sa pesanteur et sa densité de fleuve en crue (images aquatiques récurrentes), le récit nous charrie dans son flux et ses courants comme peu de romanciers y sont parvenus depuis longtemps. Depuis les grands romans de Tournier, je n'avais pas senti dans la littérature française pareille virulence ni profondeur dans le choix des thèmes ni l'exécution. On attend avec impatience les prochains ouvrages, dégraissés et condensés de Jean-Baptiste del Amo, dont le nom lui-même semble surgi d'un roman-fleuve.





A découvrir une petite interview de l'auteur aux yeux fascinants qui a , belle surprise, un amusant accent languedocien!

http://culturebox.france3.fr/all/3214/Une-%E9ducation-libertine-de-Jean-Baptiste-Del-Amo/#/all/3214/Une-éducation-libertine-de-Jean-Baptiste-Del-Amo/


samedi 23 mai 2009

LA VOIX ROYALE


"Les gens pourront toujours dire que je ne sais pas chanter mais personne ne pourra dire que je n'ai jamais chanté." Ainsi parlait Florence Foster Jenkins milliardaire excentrique du début du siècle qui convaincue d'être une des plus grandes sopranos de son temps finança son rêve avec la mégalomanie la plus totale. Non contente de donner pendant des années des séries de récitals dans la salle de bal du Ritz de New-York, cette "artiste" brimée par sa famille s'offrit le luxe du succès et de la postérité en enregistrant plusieurs albums ( pièces rares aujourd'hui!) et en se produisant au Carnegie Hall où elle fit salle pleine, comme canular ou phénomène de foire, sans jamais vouloir en convenir.
La vérité est que de diva Jenkins n'avait que la démésure et les caprices. Sa voix inaudible est celle d'une concierge s'époumonnant à chanter la reine de la nuit sous la douche! Aucune musicalité, aucun don sinon celui de ne point percevoir son ridicule, ce qui ma foi aide grandement à vivre et à être heureux.
Sur ce personnage hors norme plusieurs pièces de théâtre ont récemment été écrites qui savent toutes exploiter le grotesque et le pathétique de cette figure d'opéra comique. Celle-ci rejoint le panthéon burlesque où paradent Monsieur Jourdain, Matamore, le Baron de Charlus, la Castafiore et Zaza Napoli. On imagine d'ailleurs combien auraient su déployer tout leur talent histrionique un Michel Serraut, une Jacqueline Maillan ou une Micheline Dax ( bonjour les références théâtrales, " Au théâtre ce soir"!) tous parfaits pour ce rôle en or.





A Buenos-Aires c'est Karina K qui tient brillamment le rôle de cette oeuvre "Souvenir" de Stephen Temperley qui se joue dans le beau théâtre Regina. Les performances vocales de l'actrice sont hilarantes! Je ne crois pas avoir autant ri au théâtre ni dans la vie depuis longtemps. C'est que ce détournement des sublimes arias comme l'Ave Maria ou l'air des bijoux de Gounod en farce clownesque et ut mineur est à pleurer de rire.
Par ailleurs la pièce est une remarquable satire des prétentions artistiques de chacun de nous, des ravages de la vanité et du franchissement joyeux de la ligne du ridicule. La cantatrice version "casseroles et faussets" ( titre d'une chanson de Juliette qui traite de FF. Jenkins!) nous donne en fait une leçon d'entêtement et de félicité. Cet affranchissement total de l'opinion d'autrui n'est-il pas finalement une des voies royales empruntées par le génie ou le fou pour donner pleine réalisation à son délire. Artistes, amoureux, criminels... tous cèdent à la grande tentation d'aller au bout de leur désir, de donner corps et formes à leur vision du réel. La diva Jenkins prétendait avoir l'oreille absolue et n'entendait pas les rires sarcastiques de son auditoire.
La force de l'auto-conviction serait-elle la clef du bonheur?
La pièce au final émouvant nous conduit vers cette réflexion douce-amère.

En tout cas il faut entendre au moins une fois le chant de la vraie Jenkins pour faire démentir la célèbre phrase que Laclos prête à la Merteuil "La vanité et le bonheur sont incompatibles".
Sur le lien suivant, un extrait de Mozart "La flute enchantée" pour ceux qui ne reconnaîtraient pas!

UN SAINT-SEBASTIEN VAUDOUISANT


Le thème hagiographique et iconographique de Saint-Sébastien m'est cher. L'histoire du centurion romain sagitté par les archers de Dioclétien et achevé à coups de bâtons est devenu un des motifs picturaux masculins de l'art chrétien les plus représentés après le corps du Christ. C'est que le jeune martyre au corps nu et transpercé de flèches soulignant divers points de sa belle anatomie, permettait de peindre la grâce et la sensualité, l'extase et la douleur, l'éros et la mort en une même scène, flamboyante et ambigüe.
Devenu protecteur contre la peste ( celle-ci étant vue comme lançant ses flèches épidémiques sur les peuples) sa popularité a gagné l'Europe à la vitesse de la panique provoquée par la peur du grand mal. On trouve ainsi des Saint-Sébastien partout et sa figure est soumise à tous les traitements, des plus lascifs aux plus morbides.



Mishima

Aujourd'hui associé pour sa charge érotique à l'imagerie et à la cause homosexuelle, il est de nouveau convoqué par les artistes pop comme Pierre et Gilles, après avoir été sanctifié par Mishima en littérature, par Debussy en musique, ou au cinéma avec "Sebastiane"un des très rares films joué en latin. En effet il s'agit là de la langue originelle du saint né à en gaule narbonnaise ( so am i !) et mis en sépulture dans les catacombes de Rome, près de la via Appia où je me suis jadis rendu en pélerinage!
Pierre et Gilles

Rajoutons que j'ai vécu dans la ville de Sao Sebastião de Rio de Janeiro, nom complet de la cidade maravilhosa où il est aussi honoré ( c'est l'étymologie grecque de sebastos) sous le nom de Oxossi dans le cérémonies de Candomblé (figure de l'indien chasseur des forêts).
Bouteille de rituel à Bossou Trois Cornes
Enfin ce petit court-métrage d'animation produit par le jeune et prodige Joaquim Baldwin, étudiant à UCLA, originaire du Paraguay et primé à Cannes, fait le lien entre le vaudou haïtien (pays où j'ai eu la chance de vivre et de découvrir l'équivalent vaudou de mon saint patronyme, Bossou trois cornes) et le mythe du beau sagitté prêt à tout sacrifier par amour ( la comparaison s'arrête ici...)



http://www.youtube.com/watch?v=2ePWK0qfisE&feature=featured

Remarquable travail d'animation et belle réflexion sur le statut de héros sacrifié et martyr.

lundi 18 mai 2009

ARACHNOPHILIE



Il y eut le film de Babenco, le musical à Broadway, des dizaines d'adaptations sur les scènes du monde entier et finalement une version théâtrale dans la ville où le roman se situe, Buenos-Aires.
Manuel Puig n'a jamais été prophète en son pays, il en est plutôt la mauvaise conscience, comme le sont tous les grands écrivains nationaux, répudiés, exilés puis consacrés. "Le baiser de la femme araignée" est d'abord et surtout un roman complexe et dense qui ne peut qu'avoir à souffrir de se voir transposé sous quelque forme que ce soit.


Le huis-clos que vivent ces deux incarcérés dans leur cellule se prête certes à une théâtralisation facile. Les conflits de personnalités entre l'homosexuel flamboyant et cinéphile Molina et le jeune prisonnier politique endoctriné par la cause révolutionnaire, est riche en coups d'éclats et tension dramatique. La richesse et l'ironie des dialogues de Puig si amateur des discours retranscrits favorise de beaux échanges de répliques. Enfin la force des thématiques, psychologique, morale, politique et les jeux de transgression qui se donnent à voir sur scène dans le rapprochement et la complicité de deux personnages aux antipodes est un matériel parfait pour une réflexion théâtrale qui se veut intellectuelle et populaire à la fois.
Tout cela se retrouve dans la mise en scène trop tranquille que Szchumacher propose au théâtre El Cubo. Le public suit, amusé, intéressé, incommodé et conquis finalement. Tout cela tient surtout au charisme et à l'interprétation impeccable de Humberto Tortonese qui campe un Molina royal. On ne vient que pour lui et on retiendra surtout sa performance.



La pièce est trop courte, la fin tronquée, évacuée par une voix off très inefficace. On reste un peu déçu... cette femme araignée aurait gagné à être plus sombre, plus venimeuse et plus vorace. Un peu plus de monstruosité por favor!
Il ne reste plus qu'à se plonger dans le roman de Puig pour être pris dans la toile de son style et se laisse délicieusement dévoré.

dimanche 17 mai 2009

PRINCESSES POP DISPARUES

Les années 8o dont tous les trentenaires sont absurdement nostalgiques, m'ont surtout séduit pour leurs sonorités synthétiques, alors que l'on découvrait la musique électro à force de bidouillages sur claviers et boîte à rythmes. Ces sons métalliques, lasérisées, sortis d'ordinateurs première gamme ont à mes oreilles des accents juvéniles, ludiques qui sont en rapport direct avec cette étape de ma vie musicale. Lorsqu'ils sont mariés à des mélodies faciles et des strophes bien rimées parsemées de trouvailles métaphoriques, je craque! Et si en plus une égérie glamour ou inquiétante les chantonne avec un look underground à faire frémir ( de désir, de peur ou de ridicule!) alors on atteint vite l'extase sur l'échelle sismique de la pop music. Grâce au trésor inépuisable qu'est Youtube on peut remettre des visages et des images sur ces airs qui ont traversé de manière fulgurante les ondes de la FM. Des vidéo-clips pleins de fraîcheur et d'invention fait avec trois francs six sous viennent nous rafraîchir la mémoire et ressucite une adolescence , édulcorée et MTVisée, que pour rien au monde cependant on ne voudrait retrouver! A suivre une sélection de divas pop toutes éphémères, certaines clinquantes, d'autres obscures, toutes fascinantes.

Honneur aux francophones:

Jeanne Mas fut l'idole de mes 13 ans avant que je ne découvre Barbara dont elle était le brouillon glam-punk vite périmé et consummé dans le mauvais goût incompréhensible de la suite de sa carrière. Il n'y eut qu'une toute première et dernière fois pour aimer cette figure si déjantée et si variétoche, qui a fourni cependant des chansons magnifiques cachées dans ses deux premiers LP. Elle chantait cette semaine à l'Olympia, blonde! (trahison capillaire impardonnable) et reprenait son lassant "En rouge et noir" alors que la décristallisation stendhalienne a eu lieu depuis fort longtemps! Qu'importe, écoutez l'introuvable face B de "Toute première fois" le magnifique "Viens" que le barbarophile Matthieu Rosaz reprend superbement en version piano.

http://www.youtube.com/watch?v=mmh-zo-upn0

Mais le chef d'oeuvre de Jeanne Mas c'est la chanson de Musumara "Suspens" dont le thème au piano est d'une mélancolie obsédante et les paroles d'un dramatisme imparable. Je découvre le clip simplissime et très réussi où Jeanne conduit une décapotable dans la nuit romaine, très dolce vita eigthies. Laissez-vous séduire, tout comme le fut André Téchiné qui inclut cette chanson à son beau film sombre "Le lieu du crime" pour en faire le thème du personnage incarné par Deneuve.

http://www.youtube.com/watch?v=OxAQYdtZcN4


"A peine 21 ans" c'était le titre du bel album de Jil Caplan, look de Gavroche au féminin, voix à la Vartan, mélodies géniales de Jay Alansky, elle avait tout pour plaire et devenir "La charmeuse de serpents" qu'on a connue. Son succès "Nathalie Wood" rogne sur 1990, mais toute la "quintessence" des eighties y est : refrain attrape-coeur, arrangements synthétisés et imagerie pop garantie. la belle Jil continue une jolie carrière plus discrète mais ses fans de la première heure sont toujours là, (comme pour la plupart des princesses pops en disgrâce) !


http://www.youtube.com/watch?v=iQfiYBUnx3g&feature=related


Je ne parlerai pas ( formule de préterition) de l'îcone absolue (conne absolue, qui a osé?) Lio à laquelle j'ai déjà consacré un post , mais question de protocole, une photo et un lien s'impose pour l'Infante de la pop, survivante de tout, éternelle et nouvelle star du petit écran, quand on a la grâce et le cran et que sa vie est plus rocambolesque encore que ses chansons, on ne compte jamais pour une prune. Regardez ce clip "Sage comme une image" et comprenez la fraîcheur perdue et naïve de la musique populaire des années 80.


http://www.youtube.com/watch?v=WuS1lKnkUWo



Evoquer Lio me conduit à nommer sa suivante (aïe!), Elli Medeiros, consacrée par Daho, ressuciteur de vieilles gloires, comme la fondatrice du mouvement punk parisien. Cette belle émigrée Uruguayenne qui flirte aussi avec le cinéma d'Assayas ou Gaël Morel, est avant tout pour moi la craquante vocaliste du duo Elli et Jacno dont les rengaines hyper synthétiques comme "Le téléphone" ou "Main dans la main" ont bercé mes dix ans. Je vous laisse admirer le déhanchement fatal et dangereux de la belle en jambes Medeiros. Quelle bégueule irrésistible! J'ai eu l'avantage de l'applaudir et la saluer l'an dernier dans un festival de Buenos-Aires où elle se produisait en rockeuse reliftée et sur-cocainée sur des airs de néo-punk et reggae-rap qui étaient loin de la starlette exotique de "A bailar calypso". Enfin une vraie dingue de 50 balais qui envoie voler la poussière!


http://www.youtube.com/watch?v=Fq_7dbaQ4QA&feature=related


Dans la droite ligne des météores propulsés dans l'oubli, je me souviens de la belge Jo Lemaire, charismatique figure de la scène new-wawe electro de Bruxelles au début des années 80 et qui avec son allure de dandy androgyne et sa voix gutturale à la Annie Lenox chantait un hymne noctambule qui trotte encore dans ma tête " La nuit te ressemble". La rythmique et les arrangements sont purement artificiels, ce qui marié à des vers saturniens crée une petite musique à la Verlaine, un peu fade mais qui s'insinue facilement en vous.

http://www.youtube.com/watch?v=vU7pQ-O--Os&feature=related

Mais la plus diva underground de toutes c'est la belle et grande Sapho, la première à faire du Raï et de l'électro arabisante avant tous, la seule " punk, rockeuse, new-wawe, world music, poétesse et chanteuse néo-réaliste" entre toutes, maintenue dans un clair-obscur médiatique car trop originale, trop bizarre, trop ethnique, trop inquiètante avec ce nom auréolé de lesbianisme et cette aura de beauté baudelairienne sortie du ghetto oriental. Sapho grande passion de mes 15 ans avec laquelle je finis par danser sur scène dans une MJC du Vaucluse, à la fin d'un récital où j'avais traîné mes parents! (et j'avais même ramassé en vrai fétichiste une "invisible" tombée de la chevelure moutonnant jusqu'à l'encolure de la très chère, la très belle, la très chantante Sapho!!)

http://www.youtube.com/watch?v=L44wN7rszNM&feature=related




Le lien video est pourri mais la chanson "Carmel" est une des plus fortes, des plus entraînantes, et Sapho est dans un état de transe télévisuelle hallucinant avec ses effets de cape et sa frange peroxydée! Impayable! Ce genre de folie est exactement ce que je demande à une artise de variété. La femme absolument anti-naturelle et explosive sortie des fleurs du mal post-punk!Elle explique tout cela dans l'interview qui suit, cette extravagante impossible à banaliser!



http://www.youtube.com/watch?v=Lxl9W0C01WA&feature=related

Où êtes-vous princesses pop?

Enfuies comme l' adolescence?

Vous êtes reines mais au top

de cinquante ans d'extravagance.

vendredi 15 mai 2009

VILLA MUY MALA



Ne pouvant voir le film de Jacquot avec l'inévitable Huppert en dépressive bégueule de service (non je l'aime aussi!) je me console avec le roman de Quignard, "Villa Amalia". Ce Quignard qui m'avait conquis avec son magnifique "Le sexe et l'effroi" réflexion poétique sur l'éros antique et son envoûtant "Vie secrète" me déçoit ici et m'ennuie profondément.
Ce récit languissant d'une quadragénaire déçue par son mari qui décide de s'échaper de sa vie, de s'escamoter dans une fuite existentielle me semblait être la porte ouverte à une réflexion sur le dépouillement, la quête de l'essentiel jusqu'à l'anéantissement complet. Rien à voir. On a droit a une narration qui traîne, s'enlise dans des descriptions "sensorielles" de paysages et de climats pour donner une charge poètique très artificielle à ce qui n'est finalement pour le lecteur qu'une série de faits et gestes prosaïques: vente, liquidation, démagement, voyage, achats de fringues, hôtels et restaurants (menu fourni!). Cet alignement de platitudes correspond probablement à une volonté de transcrire le matérialisme de nos petites existences engluées dans les choses dont on ne se déferait vraiment jamais. Une villa sur une île napolitaine, comble du boboïsme déguisé en retraite spirituelle, devient seulement pour quelques chapitres la réponse à cette recherche de soi.


Quignard qui versait si subtilement dans le mysticisme et la métaphysique réduit ici son art à roman peau de chagrin. Certes il ya de jolis passages, sur la musique, l'amour, la filiation, la nature etc... mais tout est décoratif comme ces meubles que la protagoniste vend ou achète selon ses fuites ou ses installations. Sans parler des incursions furtives dans des thématiques graves mais hétéroclitement traitées comme la maternité par procuration, le lesbianisme, le sida, la mort de la mère, les retrouvailles avec le père etc... Tout cela tiendrait dans une si petite Villa? Quel "cafard-naüm"!
En gros je n'ai rien compris aux intentions de l'auteur que j'attendais du côté de la quête de transcendance et qui me raconte une tranche de vie de petite bourgeoise artiste qui se paie une escapade de luxe avant d'être rattrapée par son passé. Est-ce une manière de dire que de nos jours il n'est plus de salut possible dans un ailleurs ou un au-delà? Que nous sommes condamnés à changer de villa si nous espérons autre chose? Qu'on m'éclaire sur la question.


En tout cas je vois déjà quel genre de film prétentieux et vide, accessoirisé de profondeur factice ( panoramas méditéranéens, musique érudite, aphorismes quignardesques et mine glaciale de la Huppert...) le Jacquot a dû produire. Si seulement j'avais tort!


mardi 12 mai 2009

PLURIELLE DOMBASLE


Chez Arielle Dombasle, en tant que personnage du cirque médiatico-artistique, il y a beaucoup à jeter : ses prestations souvent désastreuses comme actrice, sa pseudo-voix de soprano, son intellectualisme chic , ses ressassements autobiographiques et mythomaniaques... Bref la construction de cette créature type "la fiancée de Frankeinstein" peut énerver et passer pour insupportable. Mais au delà de tous ces tics et tout ce toc, il ya du bon chez Arielle et même du très bon.
D'abord Arielle me semble, en dessous du vernis et des paillettes, être une âme sensible et écorchée, une chic fille, quelqu'un de bien. Son narcissisme poussé jusqu'aux extrêmes de la chirurgie esthétique est sûrement la traduction d'un mal être, d'un désir angoissé de reconnaissance par l'image. En tout cas il donne l'occasion à de bons photographes de réaliser des portraits où explose une aura comme peu de visages féminins savent en produire. La preuve par l'exemple:





Ensuite sur le plan musical, même si elle a commis des crimes sonores qui seuls peuvent être appréciés au dixième degré par les amateurs de kitsch dont je suis parfois, j'aimerais citer quelques perles rares qui redoreraient le blason de la Dombasle auprès de ceux qui la détestent.
Tout d'abord deux titres de son album latino "Amor amor" parfaitement produits dans la tradition cubano-américaine des années 50, le magnifique "Rhum and coca-cola" http://www.youtube.com/watch?v=USBdKIf0Odk&feature=related
et le très réussi "Sway" (pas de version vidéo à proposer) qui me semble une des meilleures versions enregistrées à ce jour. Le reste de l'album me semble risible et inaudible, mais curieusement ces deux titres y rayonnent, sans le sauver.



Tout récemment Arielle s'est alliée à Philipe Katerine et au pianiste hype Gonzales pour réaliser un album-ovni "Glamour à mort" dont je n'ai pu écouter que quelques titres. La première impression est que, fidèle à elle-même, la Dombasle nous envoie dans les oreilles un peu tout et n'importe quoi. Le titre phare "Extra" est une mélodie pop déjantée qui peut séduire et lasser aussi vite. La folie Katerine me semble un tour d'illusion, un jeu plus "insincère" que la folie de Dombasle qui chez elle est authentique et innée. Arielle c'est du vrai, c'est du chiqué pur jus, c'est du chichi-pompon de qualité, c'est du Tout -en -toc qui tient la route...
Enfin de ce dernier opus je retiens deux titres " Poney rose"
une comptine irrésistible et qui colle à la peau de la chanteuse
et "Monseigneur"
qui joue avec la mélancolie sadienne et le doux blasphème.

Enfin pour en finir avec Arielle (est-ce possible?) je rappelle pour plaider sa cause ce qu'elle a osé faire de plus fou et de plus réussi, son show Crazy Arielle au Crazy Horse:


Elle y tient ce rôle le plus strictement écrit pour elle par les dieux pervers du music-hall, celui de pin-up aguichante et sublime, légèrement meneuse de revue, actrice en pointillé, chanteuse dans un souffle vite envolé, star dans un pandémonium pop où elle scintille au milieu de toutes nos fantaisies de pacotilles.




lundi 11 mai 2009

LE PASSE DEFINI A FLORIANOPOLIS



Je relis Le passé défini, l'excellent journal que tint Cocteau en 1951-1952, sur une plage de Florianopolis, et j'en livre ici quelques passages avant que les vagues n'effacent la trace des phrases écrites sur le livre de sable.
"Je ne crois pas à cette terre. Mais je crois aux sentiments qu'on y éprouve et aux passe-temps qu'on s'y forge."





"Mes limites.
Il y a un point aigü que je ne peux pas obtenir, une note haute que je ne peux pas donner. Il faut se résoudre à admettre ses lmites. c'est sans doute la raison profonde qui me fait changer mes moyens d'expression. Un espoir de donner cette note ailleurs. Mais la limite reste partout la même."



"La seule force d'une "vérité humaine" est d'être continue."
"Plus je suis convaincu de l'à quoi bon et du ridicule de la terre, plus je m'efforce de travailler comme si je croyais qu'une oeuvre est capitale et comme si je prenais la terre au sérieux."




"Je meurs lentement et à toute vitesse. Je méprise cette terre et j'y entasse des actes et des objets. Je tremble pour ceux que j'aime. Ma propre mort m'est indifférente, sauf en ce qui la leur fait craindre. En dormant debout, je lutte. Je m'acharne avec paresse. Je suis le lieu de contradictions incompréhensibles. Mon intelligence me fait peur."
"Le particulier vaincra toujours le général (à la longue)."



lundi 4 mai 2009

DALIDESQUE: LES PERLES RARES!


Il n'y a pas grand chose à rajouter sur Dalida, star douloureuse ou tragédienne à paillettes, ce qui importe c'est de la redécouvrir comme interprète dans des chansons plus rares, oubliées, où son talent se révèle avec le charme et l'intensité qui la caractérisent.
Tout d'abord la Dalida des débuts, années 50 hautes en couleurs latines, avec cette jeune fille italienne venue d'Alexandrie et triomphant à Paris. "I found my love in Portofino" un classique où elle mêle l'italien sirupeux à l'anglais et au français, cocktail irrésistible.




Et dans un style plus spanish la version chanson du célèbre Aranjuez: le vidéo clip est absolument délicieux et désuet, du kitsch en noir et blanc. L'interprétation n'en demeure pas moins impeccable et le gros plan sur le visage de Dalida face à ces roses est comme une scène de théâtre mélodramatique: toutes les émotions du coeur humain y défilent. C'est du grand art populaire que de savoir communiquer des émotions de cet ordre dans un écran de télévision.




Ensuite une version du succès de Nancy Sinatra remis au goût du jour par Tarantino et que Sheila a popularisé "à sa manière" dirait Dali, en français : "Bang bang"! La version de Dalida encore en italien me paraît plus romantique, plus légère et triste et donc irrésistible! Quelle belle époque que celle où l'on osait reprendre en langue vernaculaire les hits américains.








A suivre une traduction française de "My lady d'Arbanville" from Cat Stevens, voilà qui m'enchante sur des rythmes folks , une Dalida hyppie-celtique qui ne peut s'empêcher de colorer cette chanson avec sa touche orientale.








Et pour finir je me laisse complètement aller! Oui,une Dalida purement dalidesque, The Dalida dans un déploiement de beauté et de lyrisme rital, filmée à l'occasion d'une de ces innombrables émissions de variétés des années 70 . "Parle plus bas", chanson du film "Le parrain" dont la musique est signée Nino Rota, est vraiment un air qui lui colle à la peau. Les violons, la lumière, le souffle dans les cheveux, les gestes hiératiques, le regard foudroyant... tout cela c'est le code Dalida qui lui garantit cette aura de diva comme on n'en fait plus.




http://www.youtube.com/watch?v=AgpWlfguRpI&feature=related


Le voisinage de Dalida avec William Blake sur ce blog me paraît plus le fruit d'un hasard objectif que de mon éclectisme: mystiques, illuminés et tournés en ridicule, ils l'étaient chacun "A [leur] manière" non? A méditer!