dimanche 29 mai 2011

L'ANNEE DERNIERE A MARIENBAD





LUI: " Toujours des murs, toujours des couloirs, toujours des portes, et de l'autre côté encore d'autres murs. Avant d'arriver jusqu'à vous, avant de vous rejoindre, vous ne savez pas tout ce qu'il a fallu traverser. Et maintenant vous êtes là où je vous ai menée, et vous vous dérobez encore. Mais vous êtes là dans ce jardin, à portée de ma main, à portée de ma voix, à portée de regard, à portée de ma main".



ELLE: " Vous êtes comme une ombre et vous attendez que je m'approche."
LUI: " Il est trop tard déjà."



Un film d' Alain Resnais écrit par Alain Robbe-Grillet

Dans un jeu de miroirs et de couloirs sans issue, un homme (magnifique voix de Giorgio Albertazzi) prend une femme oiseau dans les raies de son discours amoureux et cherche à la faire sortir de sa cage dorée. Rêve perdu, souvenir oublié, promesse d'amour non tenue, départ repoussé, passion niée, jeu de hasard où l'on perd toujours... un couple impossible esquisse une chorégraphie fantômatique dans un labyrinthe baroque où il n'est question que de se perdre. A la fois chef d'oeuvre d'imprécision et jeu de pistes hyper reglé, le film est d'une élégance froide et étourdissante, tout en ombres et scintillements, comme la présence hypnotique de Delphine Seyrig.













"Oui, L'année dernière à Marienbad est totalement onirique. C'est une comédie musicale, sans chanson, qui tente d'approfondir les forces du rêve". "Je suis parti, confiait Resnais à l'Express, de cette idée : une forme d'itinéraire qui pouvait aussi être une forme d'écriture, un labyrinthe c'est à dire un chemin qui a toujours l'air guidé par des parois strictes, mais qui néanmoins à chaque instant conduit à des impasses et oblige à revenir en arrière à repasser plusieurs fois aux même endroits sur des parcours plus ou moins longs, à explorer une nouvelle direction et à retomber sur une nouvelle impossibilité."



samedi 28 mai 2011

LE BONHEUR PARADOXAL



"Les jouissances sensibles, les voluptés charnelles et esthétiques, voilà ce qui fait naufrage. Dans le déchaînement de la technique, l'opératoire a remplacé les voluptés sensorielles, le virtuel le réel, l'exploitation outrancière des potentiels les plaisirs paresseux. Exit les vagabondages et les dilettantismes du plaisir, l'hédonisme a cessé d'être d'actualité, il ne relève plus que d'une " anthropologie dépassée".

Gilles LIPOVETSKY "Le bonheur paradoxal"

vendredi 13 mai 2011

LOVE STAR

JAN SOLO le héros de STARS WAR série de films qui m'a toujours laissé d'un froid cosmique. Contrairement à la figure de Harrisson Ford sous les traits du chevalier stellaire et galactique dont j'avais une version miniature, sorte de Big Jim où se fixèrent les fantaisies inversées d'un enfant de huit ans.


L'odeur de plastique de la figurine, ses bottes de caoutchouc, les reliefs de la musculature moulée... voilà de quoi frapper l'inconscient infantile au point de suivre le sillage, encore aujourd'hui et éternellement, de tout astre empruntant l'éclat de Jan Solo et traversant mon ciel, en solo.









LES ANGES DE GIOTTO



Graciela, ma lectrice de Proust, rentre d'un merveilleux pèlerinage à Padoue, Venise, Paris et Illiers-Combray sur les traces de Marcel, le narrateur et les personnages sur lesquels nous nous penchons chaque semaine depuis deux ans pour notre cycle d'étude de La recherche.

Elle me ramène une très belle reproduction de la chapelle Scrovegni peinte par Giotto que je rêve de visiter depuis toujours et devant laquelle le narrateur compare les anges de la Pieta aux looping des avions de Roland Garros. Beauté, échange, haute voltige.

"Nous poussâmes jusqu’à Padoue ; après avoir traversé en plein soleil le jardin de l’Arena, j’entrai dans la chapelle des Giotto où la voûte entière et le fond des fresques sont si bleus qu’il semble que la radieuse journée ait passé le seuil elle aussi avec le visiteur, et soit venue un instant mettre à l’ombre et au frais son ciel pur, son ciel pur à peine un peu plus foncé d’être débarrassé des dorures de la lumière, comme en ces courts répits dont s’interrompent les plus beaux jours, quand, sans qu’on ait vu aucun nuage, le soleil ayant tourné ailleurs son regard pour un moment, l’azur, plus doux encore s’assombrit.


Dans ce ciel transporté sur la pierre bleuie volaient des anges que je voyais pour la première fois, car M. Swann ne m’avait donné de reproductions que des Vertus et des Vices, et non des fresques qui retracent l’histoire de la Vierge et du Christ. Hé bien, dans le vol des anges, je retrouvais la même impression d’action effective, littéralement réelle, que m’avaient donnée les gestes de la Charité ou de l’Envie. Avec tant de ferveur céleste, ou au moins de sagesse et d’application enfantines, qu’ils rapprochent leurs petites mains, les anges sont représentés à l’Arena, mais comme des volatiles d’une espèce particulière ayant existé réellement, ayant dû figurer dans l’histoire naturelle des temps bibliques et évangéliques. Ce sont de petits êtres qui ne manquent pas de voltiger devant les saints quand ceux-ci se promènent ; il y en a toujours quelques-uns de lâchés au-dessus d’eux, et comme ce sont des créatures réelles et effectivement volantes, on les voit s’élever, décrivant des courbes, mettant la plus grande aisance à exécuter des « loopings », fondant vers le sol la tête en bas à grand renfort d’ailes qui leur permettent de se maintenir dans des positions contraires aux lois de la pesanteur, et ils font beaucoup plus penser à une variété disparue d’oiseaux ou à de jeunes élèves de Garros s’exerçant au vol plané, qu’aux anges de l’art de la Renaissance et des époques suivantes, dont les ailes ne sont plus que des emblèmes et dont le maintien est habituellement le même que celui de personnages célestes qui ne seraient pas ailés (…). »

Marcel Proust "A la recherche du Temps Perdu"

dimanche 8 mai 2011

KINO EN AUTOMNE



LE JOLI DEBUT DU MOIS DE MAI

Une semaine de vacances en mots et images, des voyages immobiles dans un recoin de la cage aux méridiens.


Samedi, soirée avec le magnifique corps de ballet de danse contemporaine San Martin dont je ne rate aucune présentation depuis cinq ans. Gershiwn et sa Raphosdy in blue, Nino Rota ou Beethoven, et une étrange performance plastique aux allures orientales en constituérent le programme.


Le jeudi, plaisir et privilège d'un dîner avec le chorégraphe Mauricio Wainrot grâce à JM StLoup. Anecdotes du monde en chaussons entre Béjart, Noureev et Ludmilla Tcherina.

Dimanche, soirée au Konex avec la troupe dynamique del Choque Urbano pour un spectacle énergétique de percussions alternatives et danse de rues. Sympathique, contagieux mais on attend plus de pirouettes et de performances dansées!




Lundi, conférence de l'écrivain Jean Echenoz à la Foire du Livre. Auteur austère et méticuleux dont j'ai essayé de lire le "Ravel". Ecriture admirable mais que j'ai encore du mal à savourer.



Mercredi journée dans le delta de Tigre avec le jeune danseur KINO pour une agréable session photograhique (à voir plus haut). Escapade entre le ciel et l'eau dans un corridor de nature automnale. Seule respiration loin de la ville. Trop courte.




On a aussi écouté le nouvel album de l"exquise Jil Caplan "Revue" fait de reprises assez réussies, notamment celle du film The river of no return.




On a regardé "Cousin cousine" et "L"amour en fuite" pour revoir le beau visage envolé de Marie-France Pisier et faire résonner sa voix et son rire cristallins.


Je retiens cete phrase de Truffau:t "L'amour c'est quand on commence à agir contre son intérêt".


J'ai commencé à lire par intermittences un peu de Duras, du Lipovetski et des pages du temps retrouvé, des fragments toujours passionnants de la biographie de Proust par Tadié. Pas assez lu, pas su lire vraiment. C'est pourtant vers cette destination, la littérature, loin des spectacles, sorties et évasion en images... que devraient véritablement s'orienter tous mes désirs et tous mes efforts.