vendredi 20 avril 2012

mardi 17 avril 2012

BILL GEDNEY



Belle découverte que celle de William Gedney, photographe américain peu connu de son vivant et qui commence depuis dix ans à gagner la place de premier plan qui lui revient. Il s'inscrit dans la tradition du réalisme américain, toujours soucieux de représenter le quotidien des exclus du rêve made in USA et des marginaux de la contre-culture. Il sait aussi extraire la beauté et la grâce de ces groupes humains auxquels il s'intègre et dont il partage l'existence. Par un démarche d'immersion sociale et un vrai tissage de liens affectifs avec des familles américaines ou des étrangers croisés par hasard, il amène ses "modèles" à un stade de confiance et d'intimité qui donne pour résultat ces photographies où dominent un abandon, un naturel plein de grâce et de vérité.


Paysans, émigrants ou ouvriers au chômage, hippies ou gays de San Francisco, sages misérables des bords du Gange... tous ces sujets offrent ou se laissent voler des instants de leur difficile existence avec une dignité et une noblesse qui imposent le respect. Une sensualité diffuse parcourt ces portraits et ces scènes de groupe où éclatent la beauté en friches, la beauté en guenilles, la beauté tout court. Un grand souffle de simplicité et de force dramatique traverse ses images. Le photographe ignoré et tendre qu'était Bill Gedney laisse entrevoir le meilleur de son âme nomade et de son regard aussi esthétique qu'humaniste dans ses clichés inoubliables.








jeudi 12 avril 2012

HYPATIE D'ALEXANDRIE


Le splendide film AGORA d' Alejandro Amenabar permet de se pencher sur deux mythes de l'antiquité, celui de la bibliothèque d' Alexandrie, et celui de la mystérieuse mathématicienne-philosophe Hipatie. La mise en scène époustouflante offre l'occasion de contempler des reconstitutions grandioses de cette bibliothèque et d'imaginer la vie d'une grande cité après la chute de l'empire romain. A cette époque la secte chrétienne va grandissant à grands coups de fanatisme et culte des martyrs mettant à mal les autres communautés religieuses et la structure politique héritée des romains. Le climat de superstition et d'intolérance qui régnait alors dans la cosmopolite et éclectique Alexandrie rappelle le village global de notre XXIème siècle, parallèle dont le réalisateur tire un grand profit et qu'il sait habilement mettre en relation avec la réflexion sur notre place dans l'univers.

C'est là du reste la grande préoccupation de l'héroïne, Hypatie, à laquelle Rachel Weisz prête sa grâce et sa beauté : qui de la terre ou du soleil est au centre du cosmos? quelles figures géométriques et quelles lois président à cette immense machine dans laquelle nous sommes "embarqués"? A ces interrogations métaphysiques et politiques s'ajoute une trame romanesque liant les personnages masculins gravitant autour de l'astre Hypatie, tous brillants élèves de la grande philosophe qu'elle fut, et promus à de hautes fonctions politiques ( le préfet Oreste) et spirituelles ( l'évêque Cyrille).
Impossible de ne pas s'arrêter sur le charme incandescent du jeune esclave amoureux Davus interprété par le fils de feu Anthony Minghella, Max Minghella. On regrette seulement que la seconde partie du film ne mette pas en avant ce personnage décevant enfermé dans son amour impossible et sa condition de nouvel affranchi et chrétien.







Par ailleurs on trouve son compte en passions secrètes et impossibles, dilemmes déchirants, jalousie, trahison.... le réalisateur a su remplir selon sa fantaisie les lacunes laissées par l'histoire. La légende d'Hypatie n'en ressort que grandie et ce film à gros budget bien utilisé vient enrichir ce mythe féminin aux multiples interprétations tel que nous le rappelle le philosophe américain John Thorp:

« Hypatie est l'héroïne idéale. Elle était charismatique ; elle mourut horriblement ; elle fut au centre d'un jeu compliqué de tensions politiques et religieuses ; et – la qualification la plus importante pour le statut de héros – en fin de compte nous savons très peu sur elle de façon claire et certaine. Une étoile qui brille, certes, mais vue à travers les brumes du temps et de l'oubli. Nos incertitudes invitent la construction d'une héroïne. L'un des principaux thèmes des études récentes sur Hypatie est précisément la diversité des interprétations de son histoire. Un livre italien, d'Elena Gajeri, portant le titre Ipazia, un mito letterario – « Hypatie, un mythe littéraire » suggère qu'Hypatie, telle que nous la connaissons, est une construction de l'imaginaire plutôt qu'une réalité de l'histoire. »

« Déjà dans l'antiquité tardive elle était une héroïne païenne pour avoir été massacrée par les chrétiens, ou encore une héroïne des ariens pour avoir été massacrée par les orthodoxes, ou encore une héroïne des chrétiens de Constantinople pour avoir été massacrée par les chrétiens intempérants d'Alexandrie. Plus récemment elle s'est vue traiter d’héroïne anticléricale, victime de la hiérarchie ; héroïne protestante, victime de l'église catholique ; héroïne du romantisme hellénisant, victime de l'abandon par l'Occident de sa culture hellénique ; héroïne du positivisme, victime de la conquête de la science par la religion ; et, tout dernièrement, héroïne du féminisme, victime de la misogynie chrétienne. Femme polyvalente ! »


« Vous avez donc, chez Hypatie, tous les éléments idéaux pour une histoire captivante : il y a le fait exotique, dans l'antiquité, d'une femme mathématicienne et philosophe ; il y a son charisme indéniable ; il y a l'élément érotique fourni par sa beauté et par sa virginité ; il y a le jeu imprévisible des forces politiques et religieuses dans une ville qui a toujours connu la violence ; il y a la cruauté extraordinaire de son assassinat ; et, en arrière-plan, le sentiment profond d'un changement inexorable d'ère historique. De plus il y a notre manque d'informations claires et précises sur elle, ce qui permet aux fabricants de légendes de remplir les lacunes comme ils veulent »



dimanche 8 avril 2012

DANSE AVEC LES FAUNES

NICOLAS LE RICHE






DAVID LICHINE

NIJINSKI

RUDOLF VALENTINO

SERGE LIFAR

vendredi 6 avril 2012

24 HEURES


"On ne vit une heure pareille qu'une seule fois dans sa vie, et cela n'arrive qu'à une personne parmi des millions; moi non plus je ne me serais jamais doutée, sans ce terrible hasard, avec quelle force de désespoir, avec quelle rage effrénée un homme abandonné, un homme perdu aspire une dernière fois la moindre goutte écarlate de la vie; éloignée pendant vingt ans comme je l'avais été, de toutes les puissances démoniaques de l'existence, je n'aurais jamais compris la manière grandiose et fantastique dont parfois la nature concentre dans quelques souffles rapides tout ce qu'il y a en elle de chaleur et de glace, de vie et de mort, de ravissement et de désespérance. Et cette nuit fut tellement remplie de luttes et de paroles, de passion, de colère et de haine, de larmes de supplications, d'ivresse qu'elle me parut durer mille ans et que nous, ces deux êtres humains qui chancelaient enlacés vers le fond de l'abîme, l'un enragé de mourir, l'autre en toute innocence - nous sortîmes complètement transformés de ce tumulte mortel, différents, entièrement changés, avec un autre esprit et une autre sensibilité."

"Vingt-quatre heures de la vie d'une femme" Stefan Zweig

Photo Imogen Cunningham et Irving Penn

lundi 2 avril 2012

THE CITY OF YOUR FINAL DESTINATION


Ce film assez peu connu de James Ivory est sorti en 2009. Il se situe en Uruguay mais a été tourné en Argentine, mettant ainsi à l'honneur la lumière blafarde du Rio de la Plata sous laquelle j'ai posé depuis bientôt sept ans mes pénates de français errant. (Je souhaite seulement que le titre n'est pas pour moi valeur d'oracle.)
L'histoire? un jeune universitaire américaine, le séduisant acteur d'origine iranienne Omar Metwally, se rend dans l'estancia d'un écrivain décédé dont il veut rédiger la biographie. Il lui faut pour cela gagner l'autorisation de la famille de celui-ci, veuve, frère et maîtresse qui végètent dans le souvenir du défunt illustre. Evidemment le voyage entrepris se révèlera plus qu'une mission de travail et bouleversera l'existence du jeune américain. Exotisme, littérature et amour font bon ménage et souvent de bien mauvais films. Celui-ci se laisse regarder pour la qualité des acteurs, Hopkins, Charlotte Gainsbourg et du réalisateur qui nous a habitués à mieux. La musique de Jorge Drexler et le talent de l'actrice argentine Norma Leandro viennent donner une couleur locale de convention à un ensemble parfois assez fade. Il reste au bout du compte de beaux visages et de vastes paysages, c'est déjà pas mal.