mercredi 20 mai 2015

CHEZ GUY GILLES


Quelques captures d'écran de deux films poétiques et au charme suranné de Guy Gilles, réalisateur issu de la Nouvelle Vague et un peu vite oublié.: L'AMOUR À LA MER et LE JARDIN QUI BASCULE.

On est frappé par la dimension photographique de ses cadrages, la nervosité de ses plans vite coupés qui éblouissent comme des flashs, la délicatesse des dialogues proches de Rohmer. Des acteurs sensibles aux beaux visages amoureusement filmés et des actrices aux yeux d'oiseau blessé hantent des atmosphères marginales (un jardin abandonné, une chambre de marin, un bar de nuit…). Toute l'étoffe de ces deux films est tissée de rencontres et de ruptures, de passions à sens unique qui mettent un temps à se faire et et à se défaire. On est au plus près de ces personnages mélancoliques et de leurs errances sentimentales. Et si Jeanne Moreau ou Damia font résonner leurs chants sublimes au détour d'une séquence, on bascule, voluptueusement.


L'AMOUR À LA MER















 LE JARDIN QUI BASCULE 


























jeudi 30 avril 2015

PINK NARCISSUS



Autour de James Bidgood et de "Pink Narcissus" son ovni cinématographique réalisé pendant les années 60 dans son antre photographique new-yorkais. L'idée m'enchante d'imaginer  cet homme recréant un univers rêvé avec ses lumières et ses couleurs saturées, dans des décors de carton-pâte où posèrent les boys trouvés au coin de la rue, transformés par son artisanat fantasque en faunes, danseurs orientaux ou esclaves romains… Si on ferme un oeil sur certaines réalisations ou le kitsch cède un peu trop au vulgaire, on contemple le travail méticuleux, onirique et ironique d'un artiste longtemps enfermé sous le label"anonymous" et une fois reconnu trop vite limité au catalogage de l'homoérotisme (terme absurde et réducteur auquel ne répond jamais le pendant "hétéroérotisme").
Une infinie douceur émane de ces tons pastels et de ces peaux maquillées par les gélatines des projecteurs. Le crapuleux se teinte d'un romantisme pop, le scabreux s'édulcore, le sexuel y devient naïf. Cette tentative d'enchantement du monde mérite qu'on l'admire avec un sourire tendre et complice.
















samedi 4 avril 2015

BLACK NARCISSUS


"Le narcisse noir" est un véritable chef-d'oeuvre oublié pour cinéphile non repenti. Réalisé en 1947 par Michael Powell et Emeric Pressburger d'après le roman de l'anglaise Rumer Godden, ce film a reçu un oscar pour la somptueuse photographie de Jack Cardiff. Entièrement tourné dans les studios britanniques  et filmé selon les procédés du Technicolor, "The Black Narcissus" est avant tout un bijou visuel aussi étincelant que ceux de l'Inde Himalayenne où  le spectateur croit vraiment que le tournage a eu lieu !
 Des religieuses conduites par la sublime Deborah Kerr investissent un ancien harem sur un piton rocheux frappé par les vents afin d'y installer un dispensaire et une école pour les villageois . Le lieu à l'atmosphère sulfureuse et hostile aura tôt fait de perturber les esprits et les corps de ces femmes au bord de la crise de foi… Au-delà de l'anecdote exotique qui peut faire sourire, le film fonctionne comme un mélodrame où tout un théâtre des conflits féminins et masculins se déploie dans une distribution savoureuse : la sainte, la pêcheresse, la repentie, la défroquée… le sage, le débauché, l'effeminé. Tout le cortège des passions humaines défile devant nous sur fond de mysticisme et de moustiquaires !. Tous  essaient de lutter un temps contre les effluves obsédantes de ce "narcisse noir" qui pourrait être comme l'haleine du diable dans ce sanctuaire mal défendu. Les interprétations psychanalytiques fleurissent à chaque scène. La patine du temps a beau avoir baigné ce film dans une esthétique kitsch et flamboyante ( on n'est pas loin de Pink Narcissus !) on sourit souvent et on s'émeut plus d'une fois. Le sublime visage de Miss Kerr suffit à ce qu'on se convertisse à ce film culte !