lundi 30 mars 2009

COMME DES VOLEURS A L'EST


Lionel Baïer est un jeune auteur et cinéaste vaudois qui est venu présenter son film "Comme des voleurs à l'est" au BAFICI, le festival de cinéma international de Buenos-Aires. Il s'agit d'une autofiction filmée qui met en scène le réalisateur dans sa quête identitaire en Pologne. A la fois road-movie déjanté, psychodrame familial hilarant, invention de soi et découverte des autres, le film est plein de charme et de fraîcheur. Baïer semble une sorte de Woody Allen suisse et post-adolescent, séduisant enfant prodige, bâteleur et fantasque qui entraîne tout le monde dans sa vie rêvée, dans "sa conquête de l'or" pour paraphraser Cendras, un autre suisse qui sert de référence au réalisateur! Même si l'oeuvre a des longueurs et des lourdeurs de par sa nature auto-réferentielle et narcissique assumée, on est vraiment emballé par des scènes aux dialogues irrésistibles, notamment ceux de la soeur, rôle servie par une actrice attachante et douée, Natacha Koutchoumov, à suivre.

Baïer avait signé un opus nommé "Garçon stupide" sorte de docu-drama sur un jeune mec paumé qui cachetonnait un peu. Baïer a de quoi enchanter les programmateurs de festival de tout acabit all around the world avec des thématiques pareilles.




un lien vers le site du film http://www.commedesvoleurs.com/



(suite) Vu le mardi soir "Un autre homme" où comment un jeune journaliste naïf de la vallée de Joux tombe dans les griffes d'une pimbêche critique de cinéma de Lausanne. Film d'apprentissage dans un noir et blanc très nouvelle vague avec références médiévales et"intertextualité" pseudo-intellectuelles qui enchantent le public du festival ( composé de clones de Baier et du personnage). Cas typique de film agréable et spirituel destiné à flatter une caste d'étudiants en ciné qui adorent se voir si beaux en ce miroir... Mention spéciale toutesfois au charmant protagoniste qui fume trop, Robin Harsch.

mardi 24 mars 2009

DU CÔTÊ DU GUEPARD



Une halte viscontienne en images, en hommage aux jeunes gattopardi des dimanches après-midi.


cliquez ici http://www.saintsebastien.blogspot.com/

et sans oublier les cygnes, du côté de swann...

vendredi 20 mars 2009

UTE DANS LA SYNAGOGUE



Une chanteuse allemande vivant à New-York et chantant en français dans une synagogue du quartier chinois de Buenos-Aires... voilà de quoi surprendre et donner le tournis identitaire! Tournis enchanteur quand il s'agit de Ute Lemper qui accompagnée d'un seul piano fait revivre dans sa voix les anges et démons de Berlin, sur les ailes de Brecht et Weill. Phénoménale dans sa virtuosité qui la fait aller de la chanson réaliste de cabaret poisseux aux vocalises du jazz le plus échevélé. Fascinante de par sa silhouette de sylphide, mi femme fatale emplumée d'un rouge boa, mi clown expressioniste sous son chapeau melon noir. Epoustouflante dans l'interprétation polyglotte et "multi-émotionnelle" de "Nanna's Lied", "Youkali" ou "September song" subtilement marié à la gymnopédie n°1 de Satie.
Moment magique que ces chants yiddishs s'élévant dans le temple juif d'une communauté de refugiés de l'après-guerre en Argentine, annoncés par la blonde descendante d'allemands comme un geste de réconciliation et de grand pardon.

Ute Lemper est probablement la dernière artiste capable d'exercer sa versatilité musicale et linguistique dans des registres aussi difficiles et casse-gueule que le répertoire de Weill, Piaf, Brel ou Ferré. Avec une assurance souvent désarmante mais hélas pas toujours dénuée d'histrionisme, ( on la préfère dans la retenue et le less is better) elle impose son art avec un professionalisme à l'américaine et une sensibilité toute européenne, qui font mouche à tous les coups.



mardi 17 mars 2009

GENS DE LA LUNE


Les derniers voyages, les denières images et celles à venir pour les flâneurs et autres gens de la lune...


dimanche 15 mars 2009

UN FAUNE


L'aprés-midi d'un faune à Buenos-Aires, une session photographique à découvrir sur le lien suivant:

www.saintsebastien.blogspot.com

dimanche 8 mars 2009

BONJOUR TRISTESSE


"Sur ce sentiment inconnu dont l'ennui, la douceur m'obsèdent, j'hésite à apposer le nom, le beau nom grave de tristesse."
Avec cet incipit tout est dit sur la sensibilité et la "petite musique" de Françoise Sagan. Ce court roman qu'elle écrivit à 17 ans est un chef-d'oeuvre de psychologie et de classicisme à rapprocher des récits de Radiguet. Tout y est déjà présent de ce qui fera la force et le charme des romans à venir : la lucidité, le charme, la mélancolie soignée à grandes rasades d'amour sensuel, et surtout l'ironie aussi subtile que la douleur. Une telle précocité dans la compréhension de l'existence et sa restitution délicate dans le miroir de l'art romanesque effraie.


Hélas, "le charmant petit monstre" sera vite englouti sous les vagues succesives de la célébrité fulgurante, des scandales et d'une frénésie autodestructice. Cette légende de pacotille jeta tant d'éclat sur son oeuvre que finalement on ne lisait plus Sagan. J'avoue n'avoir moi-même su m'intéresser jusqu'ici qu'au personnage public, souvent pathétique ou drôle mais toujours attachant, au point de n'avoir lu que son recueil d'anecdotes autobiographiques "Avec mes meilleurs souvenirs" . Avec "Bonjour tristesse" je découvre une jeune fille qui soigne ses phrases comme ses blessures et met autant d'ardeur à vivre qu'à se raconter.
Impossible aussi de ne pas se rappeller le beau film de Preminger avec Jean Seberg, fragile et éblouissante, face à la sublime Déborah Kerr, sous le soleil écrasant de la Méditérranée.




"J'éprouvais, en dehors du plaisir physique et très réel que me procurait l'amour, une sorte de plaisir intellectuel à y penser. Les mots "faire l'amour" ont une séduction à eux, très verbale, en les séparant de leur sens. Ce terme de "faire" matériel et positif, uni à cette abstraction poétique du mot "amour" m'enchantait."





lundi 2 mars 2009

BLONDE TRISTE



Truman Capote son compagnon de boires et déboires, disait d'elle qu'elle était "une radieuse enfant". Son mari Arthur Miller parlait de son cas comme " la rencontre d'une pathologie individuelle et de l'appétit insatiable d'une culture de consommation capitaliste: un mystère, une obscénité..." Comment comprendre Marylin?

Faut-il plaindre Norma Jean, fille de père inconnu et d'une mère devenue folle, ballotée d'orphelinat en famille d'accueil, violée, battue, abusée par les types de toutes espèces, inconnus de passage, amants célèbres, maris démunis, producteurs vampires, présidents mafieux...
Faut-il célébrer la blonde légendaire au teint laiteux, à la grâce inouie, à la chair lumineuse, l'actrice émouvante pétrie par l'Actor Studio, la lectrice passionnée de Freud et de Dostoievsky, la chanteuse sucrée à la voix languide, la femme solitaire résistant contre tous les démons d'Hollywood, l'argent, le sexe, la décadence?



C'est sur certaines de ces questions que l'essayiste et romancier Michel Schneider se penche dans son ouvrage intitulé "Marylin, dernières séances". Qu'elles soient de cinéma ou de psychanalyse, ces séances sont celles où Marylin se livre dans toutes ses complexités et ses troubles. La relation ambigüe que celle-ci tissa avec son dernier psychanalyste le célèbre Ralph Greenson est au coeur de l'ouvrage qui se veut une investigation psycho-biographique composée selon un découpage cinématographique fait de rewind, arrêts sur image, cuts et recoupages significatifs. On y explore à la fois les bas-fonds de l'industrie hollywoodienne et les abîmes moraux dans lesquels gravitaient les protagonistes de cet univers d'artefact. La psychanalyse et le cinéma menaient de dangereuses liaisons et se nourrissaient l'un de l'autre dans des rapports sado-masochistes où toutes les pathologies mentales entraient en jeu.





"En réalité sans le savoir, mais en le désirant violemment, Ralph Greenson entra avec l'actrice dans une de ces attractions fatales auxquelles les intellectuels se livrent avec un abandon d'autant plus grand qu'ils croient rester les maîtres du jeu. Ils ne connaissent d'ennemi que l'ennui et lorsque l'étoile blanche traverse son ciel inaltéré, ce fut une distraction inespérée dans la monotonie de sa pratique. L'étonnement est une des formes les plus délicates du plaisir et la damnation la quête la plus raffinée du malheur." (...)"La blonde vaporeuse et le docteur des noirceurs, quel couple!"




Schneider, hyper-documenté sait recréer avec précision l' univers scintillant et sordide qu'est Beverly Hills ravagé par l'épidémie de psychanalyse. Marylin le traverse comme une allégorie pathétique et irrésistible, une luciole frénétiquement attirée par les feux de la rampe qui seront le bûcher de son autodestruction, un ange alcoolisé et hébétée de tranquillisants qui chanterait "aime-moi ou tue-moi" sans jamais obtenir de satisfaction.
Passionnant, dense, circonvolutoire, le livre gagnerait en intensité avec moins de digressions sur l'entourage de la star et plus de focalisation sur sa relation avec le psychanalyste fou, laquelle appelle davantage à l'écriture fictionnelle qu'à l'esthétique fragmentée du document.
Il y a là de quoi écrire le plus beau film dans lequel Marylin aurait joué son grand rôle,le sien.