dimanche 8 mars 2009

BONJOUR TRISTESSE


"Sur ce sentiment inconnu dont l'ennui, la douceur m'obsèdent, j'hésite à apposer le nom, le beau nom grave de tristesse."
Avec cet incipit tout est dit sur la sensibilité et la "petite musique" de Françoise Sagan. Ce court roman qu'elle écrivit à 17 ans est un chef-d'oeuvre de psychologie et de classicisme à rapprocher des récits de Radiguet. Tout y est déjà présent de ce qui fera la force et le charme des romans à venir : la lucidité, le charme, la mélancolie soignée à grandes rasades d'amour sensuel, et surtout l'ironie aussi subtile que la douleur. Une telle précocité dans la compréhension de l'existence et sa restitution délicate dans le miroir de l'art romanesque effraie.


Hélas, "le charmant petit monstre" sera vite englouti sous les vagues succesives de la célébrité fulgurante, des scandales et d'une frénésie autodestructice. Cette légende de pacotille jeta tant d'éclat sur son oeuvre que finalement on ne lisait plus Sagan. J'avoue n'avoir moi-même su m'intéresser jusqu'ici qu'au personnage public, souvent pathétique ou drôle mais toujours attachant, au point de n'avoir lu que son recueil d'anecdotes autobiographiques "Avec mes meilleurs souvenirs" . Avec "Bonjour tristesse" je découvre une jeune fille qui soigne ses phrases comme ses blessures et met autant d'ardeur à vivre qu'à se raconter.
Impossible aussi de ne pas se rappeller le beau film de Preminger avec Jean Seberg, fragile et éblouissante, face à la sublime Déborah Kerr, sous le soleil écrasant de la Méditérranée.




"J'éprouvais, en dehors du plaisir physique et très réel que me procurait l'amour, une sorte de plaisir intellectuel à y penser. Les mots "faire l'amour" ont une séduction à eux, très verbale, en les séparant de leur sens. Ce terme de "faire" matériel et positif, uni à cette abstraction poétique du mot "amour" m'enchantait."





1 commentaire:

St Loup a dit…

Merci d'avoir parlé de Sagan. Et bravo pour le travail de recherche!