vendredi 23 octobre 2009
FALETE, REINE DE MELODRAME
Nouvelle figure de la copla flamenca de Séville, Falete, 30 ans vient de conquérir Buenos-Aires qui l'acclame au Gran Rex dès le lever du rideau! Tel un Farinelli gitano, ce chanteur de coplas s'impose déjà par son physique hors normes et son esthétique rococo digne d'un eunuque du harem relooké par Almodovar. Grands châles fleuris, éventails argentés, tunique turquoise à brocart doré, ensemble charleston aux immenses franges rouges... il ne passe pas inaperçu et offre à son public un festival de kitsch andalou comme le grand héritier d'une Lola Flores ou Rocio Jurado qu'il est.
C'est de celle-ci qu'il se rapproche le plus par sa forte présence dramatique, son charisme indéniable qu'il souligne de quelques touches de grotesque bienvenu, et surtout par la perfection de l'interprétation. Sa voix puissante et chaude joue de tous les registres: la passion, la colère, la jalousie, la tendresse, la douleur... avec justesse et exactitude dans les effets. C'est une vraie performance que cet artiste accomplit avec un public qui l'a adopté et l'adore.
L'écouter chanter "La bien paga" ou " Procuro olvidarte" c'est se laisser submerger par ces mini-mélodrames et vaudevilles que sont les coplas, art populaire qu'il faut servir avec noblesse et un rien de grandiloquence affectée, celle-là même qu'on donne à certains sentiments en de certaines circonstances où la passion prend le dessus. De la passion, pour son art et pour la vie, Falete en a à revendre. La grâce baroque et la générosité naturelle qu'il apporte à son récital lui promettent une très longue carrière.
C'est assez merveilleux du reste de voir le public embrasser, dans un élan de fascination pour l'interprète exceptionnel, une figure à l'androgynie aussi marquée,au travestisme si cultivé. Cet enfant caché de Montserrat Caballe et Camaron de la Isla (!), rappelle par son charme tonitruant que le monde du spectacle est un univers en soi transgenre et "transréel" et que des créatures de cet ordre y sont non seulement acceptées mais qu'elles y exercent en plus un empire et une autorité d'ordre divin. Monstre sacré un Falete abat les frontières du grotesque et du sublime et nous fait directement atteindre ce qui est l'essence de tout spectacle: le goût de la liberté, de l'émotion et du beau.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire