Je découvre, tardivement et avec jubilation, le travail de l'essayiste Michel Schneider consacré à la mère de Marcel Proust et simplement intitulée "Maman". La réflexion est profonde, érudite, brillante, elle éclaire la complexe relation mère/fils sur tous les aspects, affectifs bien sûr, mais surtout littéraires. Les interactions entre le désir, la sexualité, l'art et la mort sont soulignées et décortiquées avec grand soin et une tendance psychanalysante parfois excessive même si l'ironie la tempère un peu. Proust a-t-il écrit grâce ou à cause de sa maman, ou encore malgré et voire contre elle? Ou tout cela à la fois? Au delà de la science proustienne dans laquelle évolue cet ouvrage, on trouve un éclairage très lucide sur ce qui fait la vocation littéraire, sur ce qui conduit à l'enfantement d'un artiste et d'une oeuvre.
Extraits:
"Qui écrivit la recherche? L'enfant, le "petit Marcel"? La mère en lui? Le trop talentueux adolescent habité d'un précoce désir d'écrire, le faiseur de jolies proses déjà considéré après dix ans de tâtonnements frivoles et de brillants échecs comme un raté pour n'avoir pas à trente sept ans publié un vrai livre? Ou bien par une sorte de mue inattendue, un être fort et dur qui à partir de 1908 et jusqu'à sa mort, sans désemparer, accomplit une euvre immense avec le même désir brutal que mettent les pères à posséder les mères jusqu'à ce que vie s'ensuive? car le vrai interdit venant de maman n'était pas d'être homosexuel, mais d'être écrivain."
"Maman, statue immuable ignorée du temps, visage jamais décrit, face échappant aux ravages de la vieillesse, perpétué par le désir infantile, jamais retrouvée parce que jamais perdue, maman est là."
1 commentaire:
La seule chose que j'ai eu du mal a tolérer chez Proust c'est son oedipe...désolé.
Quand-même j'ai bien aimé ton article.
Enregistrer un commentaire