jeudi 27 novembre 2008

GUERRE ET SEDUCTION ( CONTE DE PRINTEMPS)



Deux amies francophones, l'une vivant à Rio de Janeiro, l'autre à Buenos-Aires, sirotent un jus de framboise à la terrasse du Garage, le restaurant du musée de la Mode de Santiago du Chile. Elles viennent d'admirer les robes de Marylin Monroe, les uniformes militaires de Dietrich, la combinaison de satin de Rita Hayworth. Elles parlent d'amour et de désir en picorant leur tartare de crevettes. Derrière leurs larges lunettes teintées, la vie semble un perpétuel défilé de clairs-obscurs, d'ombres moirées, de soies scintillantes et lézardées sur les coutures. Toute leur existence tiendrait dans une vitrine du musée ou dans un poudrier de nacre que l'une d'elles aurait absurdement confié à un aviateur américain. Celui-ci l' aurait emporté au creux de sa jackett en agneau retourné avant de bombarder Hiroshima, mon amour. L'une d'elles, le regard perdu au loin vers les écrans plasma où chantent les madonnes s'interrogent soudain sur le sens de la beauté. Sa question flotte dans l'air comme un parfum ancien qu'on aurait retiré de la vente et dont quelques fanatiques éplorées garderaient la nostalgie éternelle... "Qu'est-ce que la beauté à la surface et dans le fond?" Alors que les glaçons sanguinolents tintinnabulent au fond des verres... son amie hasarde une réponse en forme d'interrogation: "Ne serait-ce pas la contemplation de l'éternel dans le mouvement même du temps?" Sa voisine s'émeut et laisse s'envoler la phrase comme un oiseau de paradis fauve effarouché par la brise. "Il est temps de prendre rendez-vous chez ce coiffeur du Salon BLUE. Ce soir nous descendrons au fond des caves obscures où des gigolos péruviens font éclater des globes entres leurs cuisses nues."

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Parfois, il vaut mieux ne pas penser que de laisser apparaitre le néant.
Aurait pu penser Napoléon en croisant quelques nobles italiens n'ayant pas vécu.
C'est quand on a plus rien, qu'un insecte, une couleur, nous raccroche à la vie, car sans l'autre nous ne sommes plus. Quand l'autre devient objet, nous ne sommes plus.
Cordialement